Perspectives chinoises
Numéro 88 (mars-avril 2005)
Varia
...............................................................................................................................................................................................................................................................................................
Aurore Merle
Cong Cao, China’s Scientific Elite
Londres, New York, RoutledgeCurzon, 2004, 256 p.
...............................................................................................................................................................................................................................................................................................
Avertissement
Le contenu de ce site relève de la législation française sur la propriété intellectuelle et est la propriété exclusive de
l'éditeur.
Les œuvres figurant sur ce site peuvent être consultées et reproduites sur un support papier ou numérique sous
réserve qu'elles soient strictement réservées à un usage soit personnel, soit scientifique ou pédagogique excluant
toute exploitation commerciale. La reproduction devra obligatoirement mentionner l'éditeur, le nom de la revue,
l'auteur et la référence du document.
Toute autre reproduction est interdite sauf accord préalable de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation
en vigueur en France.
Revues.org est un portail de revues en sciences humaines et sociales développé par le CLEO, Centre pour l'édition
électronique ouverte (CNRS, EHESS, UP, UAPV).
...............................................................................................................................................................................................................................................................................................
Référence électronique
Aurore Merle, « Cong Cao, China’s Scientific Elite », Perspectives chinoises [En ligne], 88 | mars-avril 2005, mis en
ligne le 15 mars 2007. URL : http://perspectiveschinoises.revues.org/696
DOI : en cours d'attribution
Éditeur : Centre d'Études Français sur la Chine contemporaine
http://perspectiveschinoises.revues.org
http://www.revues.org
Document accessible en ligne à l'adresse suivante : http://perspectiveschinoises.revues.org/index696.html
Document généré automatiquement le 01 juillet 2010. La pagination ne correspond pas à la pagination de l'édition
papier.
© Tous droits réservés
Cong Cao, China’s Scientific Elite 2
Perspectives chinoises, 88 | mars-avril 2005
Aurore Merle
Cong Cao, China’s Scientific Elite
Londres, New York, RoutledgeCurzon, 2004, 256 p.
1 Synthèse d’une thèse de doctorat, cet ouvrage propose une enquête inédite sur l’élite
scientifique de la République populaire. Prenant pour objet l’Académie des Sciences,
institution fondée dès novembre 1949, et située au sommet de la hiérarchie scientifique,
Cong Cao examine « les caractéristiques des scientifiques [nommés membres de l’Académie]
et les critères et processus par lesquels ces derniers sont évalués et promus ». Il ne s’agit
donc pas d’examiner la politique scientifique chinoise, les grandes réalisations et découvertes
scientifiques contemporaines, mais plutôt d’entrer au cœur de l’institution scientifique la plus
prestigieuse de Chine : qui sont les chercheurs qui composent cette élite ? D’où viennent-
ils, comment ont-ils été formés ? Quelles procédures et critères de sélection gouvernent la
nomination des membres de l’Académie des Sciences ?
2 Pour Cong Cao, l’enjeu de cette recherche est double : premièrement, si les élites politiques
et économiques chinoises ont fait l’objet de nombreuses recherches, l’élite scientifique n’a
jamais été étudiée de manière systématique, mais seulement au travers de biographies de
scientifiques célèbres ou à partir d’une interrogation sur les relations entre les intellectuels
et le pouvoir. L’enjeu est crucial si l’on considère l’importance de la recherche scientifique
et technologique dans le programme de modernisation chinoise. D’un point de vue plus
théorique, dans une perspective comparatiste, Cong Cao soulève la question des liens entre
l’universalisme de la science et le contexte social et politique. La sociologie de la science
s’est développée à partir d’une réflexion sur les développements scientifiques dans des pays
occidentaux et démocratiques. Qu’en est-il en Chine ? La nature du régime politique influe-
t-elle sur la constitution de l’élite scientifique, introduit-elle d’autres facteurs que ceux de
la compétence scientifique et de la méritocratie ? Quelle influence ont eu les changements
historiques majeurs qu’a connus la Chine ces cinq dernières décennies sur la science chinoise
et la formation de son élite ? S’agit-il d’une continuité historique ou à l’inverse d’une
discontinuité ?
3 Cong Cao a essentiellement eu recours à deux types de sources pour réaliser son enquête.
D’une part, pour les sources écrites, l’auteur a réuni les informations biographiques
disponibles (ouvrages écrits sur les scientifiques ou par les scientifiques, articles de journaux,
articles sur Internet). D’autre part, et c’est la richesse de son travail, des entretiens ont été
réalisés avec 79 membres de l’Académie des Sciences, d’âges, de localisations géographiques,
de disciplines divers, élus ou nommés lors de périodes différentes, s’échelonnant sur plus de
cinq décennies.
4 Organisé thématiquement, l’ouvrage rappelle d’abord brièvement les développements de
la science moderne en Chine, et présente les caractéristiques majeures des politiques
scientifiques de la Chine populaire. Dans un deuxième temps, il présente l’Académie des
Sciences et les changements institutionnels qu’elle a connue. Le cœur de l’ouvrage s’attache
ensuite à décliner les différents facteurs sociaux susceptibles d’exercer une influence dans
la nomination des membres de l’Académie des Sciences : les origines sociales (chapitre 4),
et l’influence académique des « mentors » sur leurs étudiants et leur carrière (chapitre 5),
mais aussi les réalisations des scientifiques faisant partie de l’élite, en particulier la nature
des programmes de recherche dans lesquels ils sont engagés (recherche fondamentale ou
appliquée, recherche civile ou militaire, projets-clés ou non). Mais au-delà de ces facteurs
« classiques », l’auteur s’interroge également sur l’influence du politique dans les nominations
(chapitre 7, « Rouge ou expert »). Le chapitre 8 revient ensuite de manière approfondie sur
les élections les plus récentes des membres de l’Académie, pour déterminer quels critères ont
Cong Cao, China’s Scientific Elite 3
Perspectives chinoises, 88 | mars-avril 2005
joué dans la sélection. Enfin, dans le dernier chapitre du livre, l’auteur ouvre la discussion sur
l’engagement des scientifiques.
5 L’intérêt de cette enquête est d’apporter un éclairage nouveau à la question des relations entre
le pouvoir et le savoir. En effet, Cong Cao choisit d’aborder cette question non pas sous
l’angle du rapport entre les intellectuels et le pouvoir, mais plutôt à partir de la formation d’une
communauté scientifique, de ses normes et critères d’appartenance. Le résultat est surprenant :
si les campagnes politiques contre les intellectuels ont profondément affecté les scientifiques et
ont créé un véritable traumatisme, il n’y a pas de véritable rupture de la production scientifique
durant cette période d’intense répression. L’exemple le plus révélateur est la conduite du
programme de recherche nucléaire mené en plein Grand Bond en Aavant. Pour la période
la plus contemporaine, en examinant les élections successives de nouveaux membres de
l’Académie des Sciences, l’auteur met en avant la résistance du milieu scientifique à toute
tentative d’intrusion politique et la liberté professionnelle affichée comme norme dominante.
6 Grâce à ses entretiens, l’auteur approfondit également la question du fonctionnement des
danwei (unités de travail) de recherche, des relations (guanxi) et de leur influence sur le
fonctionnement du milieu scientifique. Il montre en particulier que l’influence de ces relations
ne s’exerce pas de manière directe mais plutôt à la marge dans la nomination des membres.
7 Si Cong Cao décrit bien les changements d’organisation de l’Académie des Sciences et les
procédures d’élection de ses membres, en montrant la relative autonomie de ces derniers
par rapport au pouvoir politique, le rôle joué par l’institution et ses membres n’est pas
véritablement décrit. Le fait d’être membre de l’Académie apporte-il autre chose qu’un
crédit scientifique, qu’une reconnaissance académique ? Est-il synonyme de pouvoir dans
l’élaboration et l’orientation de la politique scientifique ? Il y a également une discontinuité
importante dans l’objet étudié : jusqu’en 1978, les sciences sociales étaient rattachées à
l’Académie des Sciences, avant d’être regroupées sous une institution autonome, l’Académie
des Sciences Sociales de Chine. Si l’élite scientifique n’inclut que les sciences dures, quel
statut donner aux sciences sociales ? Si Cong Cao a exclu les spécialistes en sciences sociales
de son enquête et s’il est fait allusion aux différences fondamentales qui existent en Chine
entre sciences « dures » et sciences sociales, il aurait été intéressant d’aborder ce problème
dans sa définition de l’élite scientifique.
Pour citer cet article
Référence électronique
Aurore Merle, « Cong Cao, China’s Scientific Elite », Perspectives chinoises [En ligne], 88 | mars-
avril 2005, mis en ligne le 15 mars 2007. URL : http://perspectiveschinoises.revues.org/696
Droits d'auteur
© Tous droits réservés